La Dramathérapie

Comprendre comment le théâtre excelle dans le rôle de thérapeute

Mathilde pérignon art-thérapeute dramathérapeute toulouse

Par Mathilde PERIGNON

Le théâtre représente un large éventail de rapports humains : alors que la vie s’écoule, toujours présente, le théâtre est un fait extraordinaire qui reproduit l’existence sous une forme spéciale.

« Le théâtre possède la terrible et indépendante capacité thérapeutique de démystifier les intrigues et les illusions qui tissent l’expérience, il est donc indispensable à une existence authentique ».

Quelles sont les forces positives qui se mobilisent dans la gestualité créatrice et quels sont leurs effets ? Qui n’a jamais simulé, joué l’étonnement, l’indifférence, fait la victime ? Il y a en chacun de nous un acteur qui sommeille, pas forcément brillant mais prêt à se prendre pour quelqu’un d’autre. Si l’on rattache la théâtrothérapie à ces brefs et rares instants qui nous voient sortir de la vérité pour quelque besoin que ce soit, alors la théâtrothérapie est une voie que nous devrions prendre plus souvent pour nos besoins psychothérapeutiques car elle nous est naturelle.

« La théâtrothérapie vise à développer le potentiel humain à partir de la dimension corporelle : la représentation de son histoire personnelle à travers l’interprétation d’un personnage est l’occasion pour l’acteur d’entreprendre un parcours de connaissance de soi, de développement et de guérison », nous dit Walter Orioli.

En effet, dans son livre Théâtre et thérapie, Walter Orioli analyse et commente tous les processus qui entrent en jeu dans les merveilleuses transformations intérieures qui s’opèrent chez l’acteur- patient. Mimer des émotions, raconter une histoire sollicite imagination et intuition, réflexion et spontanéité.

À travers ces sollicitations, la prise de distance par rapport à soi (« le dé-centrement de soi » – comme précise la psychanalyste France Schott-Bilmann dans sa préface du livre de W. Orioli – pour se projeter dans « quelque chose d’autre-que-soi ») peut induire des comportements différents.

Inconsciemment, nous contactons notre vie intérieure, nous explorons notre potentiel, nous exprimons certains de nos aspects jusqu’alors méconnus. Ce faisant, nous apaisons des tensions internes, ce qui peut aller jusqu’à des guérisons émotionnelles ou spirituelles, voire physiques. Walter Orioli déclame avec passion : « Sans technique il n’y a pas d’art, sans art, il n’y a pas de transformation ».

Dans l’action spontanée de la performance,la composante corporelle, instinctive est liée au social et à l’aspect métaphysique,dans un va-et-vient incessant entre les éléments symboliques, artistiques et psychologiques.

Qu’est-ce que la vie sans relations spontanées ni gaieté dans le renouveau ?

Le théâtre nous conduit à apprécier le divertissement gratuit, le jeu sans finalité, le développement du potentiel individuel et relationnel. Dans ce contexte, nous plaçons notre façon d’être dans l’action scénique, non pas pour donner un caractère pathologique à la société ou à l’individu, mais pour nous affranchir de toute raison « critique » et « pratique », de toute division entre le corps et l’âme.

Les personnes qui résistent le plus à cette « thérapie » sont les adultes bien structurés cognitivement qui ont un rapport problématique avec leur corps. Pour eux, il est plus difficile de se mettre dans une position d’écoute à partir de leur propre corporéité dans l’espace du jeu et de la relation proto-affective.

Comme l’écrit Orioli : « […] au théâtre, même le schizophrène possède la capacité de se créer une niche, un lieu d’expression, même étroit, qui ne rencontre pas le jugement sévère de l’autre et ne met pas en danger l’estime de soi. Ce processus a également lieu chez tout individu un tant soit peu névrosé». Il concerne donc chacun de nous.